Le PSG peut il empêcher Rabiot de jouer ? |
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Le PSG peut il empêcher Rabiot de jouer ? Publié le 22 janvier 2019 par Guillaume Gründler
Après le refus d’Adrien Rabiot, milieu de terrain du Paris Saint-Germain (PSG) de prolonger son contrat la question se pose pour le club de savoir s’il peut être écarté des terrains. Le PSG semble envisager cette option puisque Rabiot ne participe plus aux matches depuis plus d’un mois et a même été contraint de s’entrainer avec l’équipe réserve depuis le 18 janvier. Pourtant le club de la capitale s’expose à des sanctions en agissant ainsi et la commission juridique de la Ligue de Football Professionnel (LFP), saisi par le joueur, l’a rappelé à l’ordre ce mardi 22 janvier. Dans ce contexte, cet article revient sur le cadre juridique dans lequel le PSG doit évoluer pour gérer son joueur. Tout d’abord il faut rappeler que selon l’article 507 de la charte du football professionnel, les joueurs ne peuvent être écartés de l’entraînement sauf raison médicale. C’est pourquoi le PSG prendrait un risque important s’il empêchait Rabiot de s’entrainer et s’exposerait à une sanction de la LFP qui veille au respect de cette charte. Mais le PSG pourrait également être inquiété par le conseil des prud’hommes (CPH) si un tel comportement du club était assimilé à une sanction disciplinaire puisqu’en en droit du travail la procédure de sanction disciplinaire est très règlementée dans un souci de protection du salarié. Il convient de rappeler que les joueurs de foot sous contrat de travail sont des employés. Les clubs sont leurs employeurs. Dès lors un joueur ne peut être sanctionné par son club en dehors du cadre de cette procédure. Pour sanctionner un joueur il faudrait déjà un comportement fautif de celui-ci. Par exemple : refus de respecter le règlement intérieur du club, refus d’obéir à l’employeur, menaces contre l’employeur, harcèlement moral ou sexuel etc… Dans le cas de Rabiot, il paraît difficile de considérer que son refus de prolonger son contrat constitue une faute justifiant une sanction. Moins la faute du salarié est évidente plus la procédure de sanction disciplinaire sera risquée pour l’employeur qui pourra subir des conséquences économiques et médiatiques dans le cas du PSG. D’autant plus que la procédure à suivre peut être soumise à plusieurs conditions de formes. Ainsi, sauf lorsque la sanction est un simple avertissement n’ayant pas d’incidence sur sa présence dans l’entreprise, sa carrière ou sa rémunération, l’employeur qui décide de sanctionner un salarié doit déclencher la procédure disciplinaire obligatoire en trois étapes: - Convocation à un entretien du salarié dans les deux mois de la connaissance du comportement fautif par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) ou lettre remise en mains propres contre signature, précisant l’objet, la date, l’heure de l’entretien et la possibilité pour le salarié de se faire assister ; - Entretien durant lequel l’employeur expose les motifs et la nature de la sanction envisagée. Le salarié peut fournir des explications à son employeur ; - Notification de la sanction au salarié par LRAR dans les 2 jours ouvrables au minimum et dans le délai d’un mois au maximum. Etant précisé que lorsque la Convention collective applicable ou le règlement intérieur prévoient des garanties procédurales plus favorables pour le salarié, celles-ci se cumulent avec les dispositions légales que l’employeur est tenu de respecter. Par ailleurs, si la sanction encourue est un licenciement, c’est la procédure propre au licenciement pour motif personnel qui doit s’appliquer. Dès lors que l’employeur a l’obligation d’élaborer un règlement intérieur, ce règlement fixe l’échelle des sanctions. En pratique, ces sanctions vont du simple blâme au licenciement. Il est à noter que toute sanction prononcée par l’employeur qui ne serait pas prévue par le règlement intérieur encoure la nullité. De plus, toute sanction doit être proportionnée à la faute commise, et toutes les sanctions ne sont pas envisageables, certaines sont interdites : sanctions pécuniaires, sanctions discriminatoires, sanction d’un fait déjà sanctionné une première fois, etc… et le salarié peut contester sa sanction devant le CPH. Dès lors, si une sanction contre Rabiot était prononcée par le PSG en dehors de ce cadre, le juge des prud’hommes pourrait à son tour sanctionner le club. La procédure disciplinaire peut être longue et exigeante. L’intérêt pour les clubs de l’éviter, est d’obtenir un gain de temps tout en évitant de s’exposer aux conséquences négatives pour eux de cette procédure. Pour cette raison les clubs peuvent être tentés de contourner cette procédure en ayant recours à des sanctions déguisées. Notamment en mettant à l’écart un joueur en le faisant s’entrainer avec l’équipe réserve. Afin de prévenir ce comportement, la mise à l’écart du joueur est interdite par la charte du football professionnel qui prévoit à son article 507 que la mise à disposition d’un joueur professionnel dans l’équipe réserve doit être temporaire et justifiée par des motifs sportifs. Ce même article précise que cette mise à disposition : « ne doit en aucun cas se prolonger de manière régulière, permanente et définitive s’apparentant à une mise à l’écart du joueur ». Aussi un joueur qui serait mis à l’écart de la sorte pourrait saisir la commission juridique de la LFP et le club pourrait être sanctionné par celle-ci. Mais il pourrait aussi saisir le CPH dans l’hypothèse où cette mise à l’écart serait assimilée à une sanction puisqu’il faudrait alors respecter la procédure exposée préalablement. En conséquence, les clubs ont tout intérêt à réintégrer régulièrement dans le groupe principal les joueurs professionnels s’entraînant avec l’équipe réserve. Cela afin d’éviter que cette mise à disposition du joueur puisse être assimilée à une sanction. C’est pourquoi la position du PSG est aujourd’hui fragile alors que Rabiot ne joue plus depuis un mois et qu’il s’entraîne avec la réserve depuis le 18 janvier. Il serait plus prudent pour le club de réintégrer Rabiot dans le groupe tout en arguant du choix sportif pour ne pas le faire jouer. D’autant plus qu’un club comme le PSG qui dispose d’un effectif brillant peut facilement avancer cet argument pour laisse un joueur sur le banc des remplaçants. Dès lors, si c’est uniquement pour des considérations sportives et non plus disciplinaire que Rabiot ne joue plus les matches, le PSG pourrait l’empêcher de jouer sans que cela constitue pour autant une sanction soumise aux contraintes prévues par le droit du travail. Cela permettrait également au PSG de ne plus être sous le coup d’une sanction de la LFP qui vient de le rappeler à l’ordre. Mais au-delà de l’aspect juridique, le PSG peut il se permettre de se passer de Rabiot alors que celui-ci n’a pas encore quitté le club officiellement et qu’un renfort dans l’entrejeu semble nécessaire pour la suite de la saison ? Il n’est pas certain que l’entraîneur du PSG, Thomas Tuchel, soit de cet avis. |